Les élus connaissent-ils "leurs" pauvres ?
Dans la continuité d’un premier rapport publié en 2014, l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES) a souhaité approfondir sa connaissance des mécanismes qui contribuent à construire "l’invisibilité sociale" de certains publics et de mieux identifier les réalités que ce phénomène recouvre. Un travail en deux volets a été lancé en mars 2015 : une étude approfondie de certains publics "invisibles", notamment les jeunes précaires en milieu rural (jeunes ruraux et néoruraux), et une seconde étude visant à mieux comprendre les facteurs médiatiques, politiques et institutionnels qui contribuent à entretenir certains "angles morts" de l’action publique de lutte contre la pauvreté et l’exclusion. La Gazette prend l'occasion de la diffusion de cette seconde étude pour titrer : "Les élus connaissent-ils "leurs" pauvres ?"
A lire : Les élus connaissent-ils « leurs » pauvres ?, Sophie Le Gall, La Gazette, 3 mars 2016 (1 page)
Les pauvres en milieu rural et notamment les jeunes ruraux et néo-ruraux
L’objectif de cette étude réalisée par l’Ariac pour le compte de l’ONPES est de mieux comprendre les mécanismes à l’œuvre dans l’invisibilité de certaines populations rurales mises en évidence par l’étude exploratoire de FORS en 2014 : identifier les difficultés vécues par les jeunes ruraux et les néo-ruraux dans leur milieu de vie, appréhender la représentation de l’espace de ces personnes ainsi que la manière dont ces représentations et ces pratiques spatiales impactent leur processus d’entrée dans la vie professionnelle pour les jeunes ou dans le territoire pour les néo-ruraux.
Le panel est constitué de dix jeunes et onze néo-ruraux. Les personnes rencontrées ne forment pas un échantillon représentatif. Elles illustrent certaines situations peu documentées, sans épuiser la question.
Pour chaque personne enquêtée, ont été analysés : les processus d’invisibilité et ses formes, les processus menant à la pauvreté/permettant d’y échapper ou d’y faire face, le fonctionnement de l’invisibilité perçue et ses conséquences pour les personnes concernées, ainsi que pour les gestionnaires du territoire.
La construction institutionnelle de l’invisibilité sociale
Une série d’entretiens a été organisée avec quatorze décideurs politiques pour questionner les représentations sociales des élus afin de comprendre les "mécanismes d’invisibilisation". Cette étude met en lumière une perception tronquée des publics qui échappent aux dispositifs déployés par les politiques publiques et les initiatives locales.
En effet "les élus appréhendent les personnes en situation de précarité par file de public – jeunes errants, migrants, etc. – et manquent d’une vision d’ensemble ainsi que de représentations collectives", selon une chercheuse de l'Association de promotion des expérimentations sociales (Apex).
Or "la pauvreté évolue, se cache, se nuance, par exemple entre « pauvreté monétaire » et « pauvreté ressentie »", rappelle un article de La Gazette. Les élus - comme, d’ailleurs, l’ensemble de la population générale ( ont notamment beaucoup de mal à imaginer les revenus des classes moyennes en difficulté, parfois en danger de basculement dans la pauvreté. "Par conséquent, quand un élu décide de la tarification d’un service, il va penser aux personnes en situation de pauvreté, mais pas à ces classes moyennes qui auraient pourtant besoin, elles aussi, d’un coup de pouce", explique James Kuperminc, directeur d’études au bureau d’études Compas.
Mots-clés: social, culture, exclusion, agriculture, formation, insertion, jeunesse, services, élu