C’est ce qu’a annoncé la ministre du Logement, de l’Égalité des territoires et de la Ruralité le 12 novembre 2015, à l’occasion de la rencontre-débat "Vivre et habiter le périurbain, aujourd’hui et demain" organisée par le ministère avec l’appui du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET). Après les banlieues, avec le NPNRU, le monde rural avec le comité interministériel à la ruralité, c’est au tour du périurbain d’être mis sur le devant de la scène, celui-ci pouvant d’ailleurs recouper les deux premières thématiques. Parmi la série de mesures annoncées : la création d’un "lab du périurbain", plateforme pour recenser, valoriser et diffuser les projets innovants et initiatives remarquables dans ces territoires ; l’organisation d’ateliers territoriaux de l’ingénierie périurbaine dès 2016 afin de faire émerger des projets en mutualisant les initiatives et les savoir-faire des différents acteurs ; l’élaboration de conventions cadres sur le développement et l’innovation avec les principaux acteurs territoriaux ; le lancement d’une mission sur la revitalisation des petits commerces en centres-villes et en centres-bourgs. A noter : si vous souhaitez contribuer aux travaux d’exploration et de réflexion sur les territoires périurbains et leurs habitants que conduisent le ministère et le CGET, un formulaire est en ligne !
Dans deux entretiens publiés par La Croix en mars 2015 et La Gazette en juin de la même année, l’économiste Laurent Davezies analyse le creusement des inégalités entre les territoires, à l’œuvre en France depuis trente ans : le système productif a radicalement changé (et sa géographie aussi), se tournant vers une économie de la matière grise et se rétractant autour des métropoles. Si des mécanismes de redistribution ont permis de rééquilibrer les revenus entre les territoires, la crise de la dette (2011) a mis fin à l’augmentation des dépenses publiques et a accéléré la concentration territoriale de la production, détruisant les emplois dans les secteurs les plus vulnérables de l’industrie. De grandes métropoles (comme Lyon) ont su tirer leur épingle du jeu, mais les territoires qui étaient les plus dépendants des revenus non marchands sont de plus en plus vulnérables. Aujourd'hui, il y a les métropoles qui sont des territoires de dynamisme économique même si elles concentrent aussi le gros de la pauvreté, les territoires qui décrochent parce qu’ils cumulent recul de l’appareil productif, faible qualité résidentielle et baisse des dépenses publiques et, entre les deux, de larges parties du territoire qui bénéficient encore d’une économie résidentielle forte et survivront grâce au tourisme et aux retraités. "Les élus ont tendance à considérer qu’il faut à tout prix essayer de retenir les jeunes en développant localement l’emploi, les formations ou le logement. Voilà trente ans qu’on fait ça et ça ne marche pas ! (...) Il faut reculer la ligne de front. Mettre le paquet sur les zones d’accueil les plus proches qui s’en sortent le moins mal. Et pour cela, il faut libérer la mobilité, subventionner massivement les déménagements, revoir les politiques de logement et les droits de mutation qui sont un frein à la vente quand on est propriétaire."
Le discours de la fracture est à la mode, posant deux France : celle des grandes métropoles où se crée la richesse et l'autre, dite périphérique, où seraient relégués les trois-quarts de la population laborieuse. Où sont réellement les injustices territoriales et les "nouveaux déserts français"? Quels sont les critères pertinents pour les repérer ? Quelles politiques publiques sont-elles efficaces et pour quels objectifs ? Animée par ces questions, la Mission Agrobiosciences a sollicité Daniel Béhar dans le cadre des 20èmes Controverses européennes de Marciac. A travers les propos de ce géographe se dessine une fractalisation de l'espace où gagnants et perdants sont partout, dans les capitales comme dans le rural, avec une différenciation de plus en plus forte des situations territoriales (opposée à l'hypercatégorisation des territoires), soit une lecture plus fine qui appelle d'autre indicateurs (la notion de bassin de vie serait obsolète). Il faut également en finir avec un certain développement local, plaide-t-il, car "celui-ci a en effet tendance à dériver très vite vers une logique endogène, où l'on ne pense plus le développement que sur la base des ressources locales. Tout au contraire, l'enjeu actuel consiste à se demander comment, à partir d'un territoire et de ses ressources locales, prendre place dans des systèmes qui les dépassent. A partir d'un lieu donné, comment penser et organiser des politiques de flux."
Selon les données de l'Insee sur les revenus reprises dans un article du Centre d'observation de la société (créé par la société Compas), "l'espace périurbain, même s'il est très loin d'atteindre les niveaux de vie des quartiers aisés de centre-ville, reste, en moyenne, largement favorisé. Les personnes aux revenus les plus faibles vivent en partie dans le monde rural éloigné et vieillissant, mais surtout dans les quartiers d'habitat social". Et le Centre d'observation de la société de poursuivre dans un autre article que les "nouvelles données [il s'agit de France, portrait social, Insee Références, novembre 2014] indiquent clairement où se situent les difficultés sociales de la France contemporaine : proche du périphérique et non à la périphérie lointaine". Pour rappel : l'observation des revenus ne prend pas en compte un certain nombre de coûts (logement, transports...), l'accès aux services (loisirs, culture, commerce, santé...), la qualité de vie (taille du logement, nuisances, environnement...)...
Egalité des territoires, métropoles, pôles métropolitains, pôles d'équilibres territoriaux et ruraux... Derrière ces concepts au coeur de la réforme territoriale engagée se pose en toile de fond un enjeu fondamental et stratégique que le Centre de ressources du développement territoriale Etd a souhaité mettre en lumière et partager avec des acteurs locaux lors d'un séminaire organisé le 3 juillet 2014 à l'Assemblée nationale : celui de la nécessaire prise en compte des interrelations entre les espaces urbains et les espaces environnants (périurbains ou ruraux) pour engager un développement territorial adapté aux enjeux, besoins et réalités des territoires vécus. Retrouvez sur le site d'Etd les propos introductifs de Nicolas Desfachelle (vice-président d'Etd et vice-président du conseil général du Pas-de-Calais) ainsi que de nombreuses vidéos des interventions lors des deux tables rondes : "analyser et mesurer les interrelations entre espaces urbains, périurbains et ruraux" et "grands territoires : un enjeu de gouvernance et de coopération".