Comment réduire les inégalités d'accès aux soins ?
L'inégale répartition géographique des médecins et autres professionnels de santé, sous-représentés dans les zones rurales et certains quartiers urbains, est-elle une fatalité ?
En ligne de mire : la désertification médicale
Le dernier atlas de la démographie médicale, présenté en octobre 2012 par le conseil national de l'ordre des médecins fait état d'un difficile renouvellement des générations entre anciens et nouveaux médecins. Seule lueur d'espoir : la proportion de jeunes diplômés s'installant en libéral a augmenté depuis 2006, passant de 10 à 35 %.
La solution passera-t-elle par une meilleure communication sur les aides à l'installation ou la mobilisation des médecins retraités ?
De leur côté, les membres de la conférence nationale des services d'incendie et de secours se félicitent d'une stabilisation du nombre de sapeurs-pompiers volontaires (qui représentent 80% des effectifs) mais craint que l'augmentation constante d'interventions requalifie leur engagement bénévole en activité professionnelle (requérant un salaire).
Or cette hausse du nombre d'interventions semble avant tout liée à la fermeture des hôpitaux de proximité ou la carence du Samu et des services d'ambulances.
Dans ce contexte, les mesures prises à ce jour, au niveau local comme au niveau national, semblent bien insuffisantes. Entre "des mesures coercitives abandonnées" et le "flop des mesures incitatives", la Lettre du cadre territorial n'est guère optimiste !
- Atlas de la démographie médicale 2012. Conseil national de l'ordre des médecins, 18 octobre 2012
- La désertification médicale va continuer à s'intensifier, selon l'ordre des médecins. La Gazette des communes, 18 octobre 2012
- Les pompiers, des bédouins dans le désert médical. Localtis.info, 14 novembre 2012
- Déserts médicaux : échecs et succès. La Lettre du cadre territorial, 12 décembre 2012
La désertification médicale est-elle seule en cause ?
A partir d'une étude nationale sur l'accès aux soins ophtalmologiques et obstétriques, la fédération des établissements hospitaliers privés non lucratifs émet des propositions pour réduire les inégalités d'accès aux soins.
L'économiste et le géographe mobilisés par la fédération font plusieurs constats :
- l'éloignement est une cause de moindre recours aux soins : certains actes, comme la chirurgie de la cataracte, sont liés au dépistage, donc à l'accessibilité des professionnels libéraux
- la liste et le poids des frais de santé qui restent à la charge des patients ne cesse d'augmenter
- les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous sont un critère d'accessibilité des soins, mais restent très mal connus
- l'accessibilité physique (pour les personnes handicapées ou âgées) et culturelle (maîtrise de la langue française, connaissance du vocabulaire médical...) mérite d'être améliorée
La fédération leur fait écho avec des propositions qui vont de l'encadrement des dépassements d'honoraires ou des lieux d'installation des nouveaux médecins à la mise en place de "délais d'attente opposables" dans le parcours de soin des patients.
Ce que prévoit le "pacte territoire-santé" du gouvernement
Présenté le 13 décembre 2012, ce nouveau plan d'action national prévoit notamment :
- une nouvelle valorisation de la médecine générale auprès des étudiants, avec l'obligation d'effectuer au moins un stage dans cette spécialité au cours de leurs parcours de formation
- le prolongement des mesures incitatives à l'installation en zones sous-dotées
- l'encouragement d'une meilleure coordination entre professionnels, avec le soutien de la télémédecine, de transferts de compétences entre professionnels ou l'expérimentation de nouveaux modes de financement, encourageant la collégialité
Ce plan d'action fait actuellement l'objet d'une concertation nationale.
- Le "pacte" de Marisol Touraine contre les déserts médicaux. Localtis.info, 13 décembre 2012
- Le pacte territoire santé : pour lutter contre les déserts médicaux. Ministère des affaires sociales et de la santé, 15 février 2013
D'autres pistes sont à l'étude
Le rapport sénatorial du 5 février 2013 prône quant à lui pour des mesures coercitives, qui ne font pas l'unanimité. Elles risqueraient en effet "d'accélérer encore la fuite devant l'exercice libéral", boudé par les jeunes diplômés, et de ne pouvoir s'appliquer que dans une dizaine d'années, pour les étudiants en première année au moment de l'adoption de la loi.
Mais ce n'est pas leur seule proposition, puisqu'il s'agirait aussi, par exemple, "d'élargir les origines sociales et géographiques des étudiants, peu propices à l'installation dans les zones sous-dotées", en modifiant les critères de sélection en fin de première année.