Agriculture(s) et territoire(s) : les relations évoluent
Comment les acteurs du développement rural intègrent-ils les questions agricoles dans leurs projets de développement local ? Et comment les professionnels agricoles s'impliquent-ils dans ces projets ? Des chercheurs planchent sur l'articulation entre politiques agricoles et projets de territoire.
Trois études de terrain
En Midi-Pyrénées, le projet Pour et Sur le Développement Régional (PSDR) Agriculture et gouvernance des territoires ruraux (A GouTer) s'est penché sur les politiques agricoles des intercommunalités, des parcs naturels régionaux et des territoires engagés dans le programme européen Leader.
Pour eux, l'émergence de ces territoires de projet, invitant non seulement les organisations professionnelles agricoles mais aussi d'autres acteurs à se saisir des questions soulevées par l'agriculture (entretien des paysages et de l'environnement, dynamisme économique local, image du territoire...), peine à remettre en cause les logiques sectorielles.
Pour eux, "les jeux de pouvoir se nouent à d'autres échelles", entre conseils généraux et chambres d'agriculture... et "les logiques d'action varient entre cohabitation, confrontation et évitement". Le dialogue entre la profession agricole et d'autres acteurs concernés par l'avenir de l'agriculture reste donc largement à construire.
A lire : Agriculture et développement des territoires ruraux : des légitimités d'action en contradiction. Laurence Barthe et Corinne Eychenne, article présenté lors du colloque organisé par l'ESA d'Angers sur les élites agricoles et rurales, les 10 et 11 juillet 2012, 23 pages
Dans la même veine, une thèse s'est penchée sur le rapport entre les collectivités et les arboriculteurs de la moyenne vallée du Rhône (entre l'Ardèche, la Drôme et l'Isère).
Si les collectivités étudiées s'intéressent à l'arboriculture, "comme élément identitaire ou d'attractivité pour le territoire", mais aussi comme activité économique, "très peu d'arboriculteurs ont répondu aux divers projets proposés (...) sans réel lien avec les organisations agricoles".
Pour expliquer cette relative absence de dialogue, la doctorante pointe :
- la difficulté des agriculteurs à sortir d'une logique de guichet (financier) pour une logique de projet (partenarial),
- l'absence de cohérence entre les territoires administratifs ou de développement territorial et les territoires de production.
A lire : La difficile rencontre entre acteurs du monde agricole et collectivités territoriales. L'exemple de l'arboriculture de la moyenne vallée du Rhône. Cécile Praly, dans Montagne méditerranéennes n°25, 2012, pages 83 à 93
Se penchant sur les sites pilotes d'agriculture durable du Massif des Alpes, lancés en 2001, trois chercheurs soulignent quant à eux "l'émergence de partenariats nouveaux qui perdurent à l'issue de l'expérimentation" et dont la réussite repose sur la qualité de l'animation.
Leur article met en valeur le rôle et l'importance d'agents de développement compétents.
A lire : Approches multi-acteurs et projets locaux d'agriculture durable : passer de logiques sectorielles à une dynamique territoriale. Philippe Fleury, Emmanuel Guisepelli et Loïc Perron, dans Montagne méditerranéennes n°25, 2012, pages 35 à 45
Une question d'ingénierie ?
En Bourgogne, les chercheurs du projet Pour et Sur le Développement Régional (PSDR) Teragri ont étudié le rôle des pays en matière agricole.
Et c'est sur la figure de l'agent de développement qu'ils se sont eux aussi arrêtés. Pour eux, selon que l'agent est un gestionnaire, un animateur ou un éclaireur, la construction du projet agricole de territoire sera très différente.
Ils pointent le risque de standardisation des projets que peuvent entraîner la montée en puissance de l'expertise privée, la réduction des fonds publics, la spécialisation des agents de développement ou l'emprise croissante de tâches administratives dans leur quotidien.