Innovations et alternatives en agriculture
Dans son dernier numéro, la revue POUR aborde les évolutions en cours dans le champ de l'agriculture, et se penche en particulier sur les initiatives émergentes pour s'inscrire dans une démarche de développement durable.
Des innovations, pourquoi faire ?
Les différents contributeurs de ce dossier traitent en particulier de la remise en cause du modèle dit "classique" ou "conventionnel", qui promeut :
- la mécanisation du travail
- la spécialisation des exploitations agricoles
- leur agrandissement
- l'émancipation vis-à-vis du terroir et de ses contraintes pour la production
Agroécologie, écoagriculture, agriculture durable, intégrée ou raisonnée, biologique ou naturelle... les modèles alternatifs sont variés et ne font pas consensus.
Ils semblent venir "de la base", des agriculteurs eux-mêmes, plutôt que du monde de la recherche ou des conseillers agricoles et réactualiser des idées anciennes "en utilisant des approches traditionnelles de façon créative".
Pour les interroger, plusieurs chercheurs font appel à l'histoire ou aux théories de l'innovation développées par Schumpeter. Ils montrent notamment les différentes tensions qui traversent le monde agricole alternatif, et soulignent le rôle actif d'autres acteurs économiques : producteurs d'outils, distributeurs, firmes agroalimentaires...
Deux voies radicalement opposées s'ouvrent simultanément aux agriculteurs de demain :
- le retour à une agriculture ancrée localement, diversifiée voire combinée à d'autres activités
- le développement d'une agriculture de firmes, mise en oeuvre par les salariés de grandes sociétés
Un foisonnement d'initiatives locales
Mais le dossier se compose surtout d'études de cas et se concentre sur une certaine forme de relocalisation agricole :
- un magasin de producteurs adossé à un écomusée
- l'expérimentation de systèmes participatifs de garantie de bonnes pratiques agricoles
- la valorisation du bois de bocage par une société coopérative d'intérêt collectif (Scic)
- le regain de la traction animale
- des pratiques "intermédiaires" dans les grandes cultures céréalières
- plusieurs exploitations agrirurales, autour des algues ou du fromage
- la transition d'exploitations agricoles vers l'agriculture biologique
Quel accompagnement ?
Se penchant sur les politiques agricoles des collectivités locales, un chercheur note que "l'innovation est devenue un critère de sélection de nombre de projets" mais que "nous sommes prisonniers d'une conception de l'innovation par sauts, ruptures" au détriment de processus plus longs, qui se déroulent petit à petit. D'autre part, les espaces ruraux semblent devenir "des réceptacles de normes décidées à l'extérieur"...
Comment peut-on à la fois encadrer les agriculteurs, les inciter à respecter des normes de plus en plus nombreuses, et les encourager à innover ?
Deux pistes sont ouvertes :
- la mobilisation des chercheurs, que la future Politique Agricole Commune pourrait encourager
- la coconstruction de politiques publiques d'appui à l'innovation, avec l'exemple du soutien à l'agriruralité en Languedoc-Roussillon
Innovations et alternatives en agriculture. Revue POUR n°212, décembre 2011, 204 pages, 20 euros