La construction d'offres d'activités a-t-elle à apprendre des nouvelles formes d'économies rurales ?

Les initiatives mises en avant lors des trois webconférences organisées par Cap Rural en 2016 sont des expériences porteuses de nouvelles formes d’économies rurales ; elles pourraient être qualifiées d’économie circulaire pour certaines, d’économie collaborative pour d’autres. Ces nouvelles formes d’économies rurales permettent de créer de nouvelles activités (génératrices de revenus, d’emplois) dans un état d'esprit de liens avec les acteurs locaux, de réponse à des besoins des territoires et/ou de valorisation de ressources locales. Aussi, il semble intéressant de repérer en quoi elles confortent ou bousculent des éléments de la méthode de construction d’offres d’activités (COA).

4 expériences et 2 manières de créer des activités avec une approche de développement local

Des démarches « formelles », portées par une structure dans le cadre d’un dispositif et animées par un professionnel du développement. Ce dernier accompagne l’émergence de nouveaux produits et/ou services en réponse à des besoins d’acteurs locaux (personnes âgées, professionnels de la santé, entreprises) qui vont travailler en synergie pour participer à la construction de la solution.

Des démarches menées de manière plus "intuitives", portées par un collectif d’individus, guidées par leurs envies, la dynamique collaborative et dans une volonté d’ancrage territorial. Le collectif monte lui-même le projet avec peu d’accompagnement extérieur et peu de liens à la collectivité locale.

Des éléments de méthode convergents entre ces démarches "formelles" et la COA

La présence d’un professionnel du développement (appelé acteur pivot selon la COA) au sein de structures de développement local :

  • Le chargé d'opération Ecologie industrielle et territoriale de l’association Biovallée (26) dans le cadre d’un programme d’écologie industrielle et territoriale
  • Et le chargé de mission développement local du comité d’expansion dans le cadre d’un dispositif d’appui aux living lab.

Ces professionnels développent les compétences suivantes : proposition et suivi d’une méthode dont ils sont le garant, mobilisation d’acteurs divers, animation de groupes de travail d’acteurs locaux, appui à la priorisation de besoins, de ressources. En termes de posture, il s’agit notamment d’être au contact (des acteurs, du territoire), de s’adapter aux publics (notamment aux entrepreneurs), d’avancer pas à pas, d’être curieux et de ne pas avoir de préjugés au départ sur la fiabilité de telle ou telle idée.

Une démarche de développement local de la création d’activités où les acteurs impliqués prennent le temps au démarrage d’identifier et d’approfondir le problème et de ne pas aller tout de suite à une solution. Les expériences s'appuient aussi sur le repérage de ressources, de besoins, de synergies qui sont travaillés et transformés en idées idées d'activités afin de les proposer à des porteurs de projets.

La mobilisation d’un groupe de travail (appelé groupe local selon la COA) d’acteurs variés tous intéressés par le sujet mais avec des entrées, des façons de voir différentes. Il est composé d’entreprises (avec un besoin, des synergies à travailler ou pouvant contribuer à la construction d’une réponse nouvelle), d’usagers, de professionnels, d’élus du territoire ou de territoires proches. Cette dynamique collective d’acteurs se veut opérationnelle, elle aide à repérer besoins et ressources à travailler, à les questionner, à construire des solutions nouvelles, adaptées au territoire. Ces expériences mettent l’attention sur l’implication des usagers et des entreprises.

Une action incontournable : le repérage de besoins, de ressources... pouvant générer de nouvelles activités

  • En mettant en avant la nécessité de mener cette action en continu.
  • En mêlant un travail de connaissance de terrain (par le professionnel de développement, en lien avec les acteurs locaux) et statistique.
  • En partant soit :
    • d’une prospection large sur un champ donné
      Ex : l’écologie industrielle et territoriale : identification de pistes d’activités par des rencontres et entretiens auprès des entreprises, priorisation des synergies et mutualisations à travailler (avec comme critère de sélection essentiel l’implication des acteurs) puis une analyse de la fiabilité de la synergie
    • d’un diagnostic ciblé
      Ex : sur le maintien au domicile des personnes âgées.

La COA confrontée à de nouvelles pratiques 

Dans certaines expériences présentées, la faisabilité de l’activité est travaillée de manière plus pragmatique. Dans les exemples de living lab ou de projets collectifs d’individus, les acteurs ne font pas appel à une étude de faisabilité classique mais ils vont plutôt proposer une mise en action pour tester grandeur nature la solution.

  • Soit en lançant rapidement des opportunités d’expérimentation afin de construire et de tester de nouvelles solutions en s’appuyant sur des compétences diverses, des technologies nouvelles... Cette méthode permet de mettre en mouvement, en dynamique les acteurs.
  • Soit en raisonnant une progressivité des activités sur un lieu. Cela peut consister à tester des idées, des besoins par les porteurs de projets eux-mêmes mais aussi à saisir des opportunités de collaborations.

Une nouvelle grille de lecture des potentiels d’accueil et d’activités ?

Les entrées classiques se retrouvent comme :

  • Des bâtiments et terrains vacants : ancien château à vendre avec plusieurs dépendances et du terrain, ancienne gare, friche industrielle.
  • Des besoins d’entreprises, de collectivités : valorisation de déchets, programmation culturelle.
  • Des besoins des habitants : maintien à domicile des personnes âgées.

Mais les expériences nous apportent aussi de nouvelles lunettes : 

  • Des dynamiques collectives, des collaborations qui font naître des potentiels (ex : animation et gestion d’un lieu collectif d’habitat et d’activités).
  • L’identification de flux de matière et d’énergie entre entreprises, associations, collectivités qui peuvent révéler des besoins et opportunités de mutualisation de biens ou de services (ex : transport, station d’épuration) et de synergies (ex : déchets d’une entreprise qui deviennent matière première pour une autre).
  • La diversité des potentiels d'un lieu collectif et leur maillage : des bâtiments, des terrains vides présentant des opportunités d’installation, le besoin d'animation et de gestion du lieu pouvant générer un emploi, des besoins de services à destination des familles habitant le lieu...

Une animation de la démarche conduite par un ou plusieurs acteurs non professionnels du développement. Dans les cas présentés, il s'agit d'une ou de plusieurs personnes issues du collectif de porteurs de projets. Ces individus ont une fibre développement local à savoir qu'ils font du lien avec les acteurs, les structures du territoire, qu'ils souhaitent répondre à des besoins, des manques du territoire, qu'ils valorisent un patrimoine bâti, des savoir-faire...

Quelques enseignements à retenir de ces nouvelles formes d'économies

Ces différentes expériences mettent en avant des démarches de créations de nouvelles activités :

  • Chemin faisant, qui demandent à la fois de la souplesse et de la méthode
  • Pragmatiques et mobilisant des acteurs très divers, à aller chercher dans des réseaux différents
  • Qui peuvent être difficile à expliquer, dont les arguments sont à affiner pour prouver l'efficience
  • Avec le besoin d’un temps d’animation porté par un salarié ou un individu (ou plusieurs) d’un collectif
  • Qui demandent de nouvelles lunettes pour identifier de nouveaux potentiels (en lien avec les flux, les dynamiques collaboratives...)
  • Qui nécessitent du temps pour qu’une activité voit le jour
  • Qui contribuent à l'économie de proximité sur les territoires ruraux et périurbains.

Ces propos nous amènent à penser que la construction d'offres d'activités peut s'enrichir de nouvelles pratiques menées sur de nouveaux sujets en lien avec la transition et/ou par nouveaux acteurs.

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Mots-clés: Construction d'offres d'activités, économie collaborative, transition, méthodologie