Retour sur les rencontres d’automne des Nouvelles Ruralités
Cap Rural s'est rendu les 29 et 30 septembre 2016 au séminaire national organisé à Châtel-Guyon (63) par Nouvelles Ruralités, une association nationale initiée en 2012 par quatre départements, dont celui de la Nièvre, qui s'est ouverte en 2015 à de multiples acteurs des territoires ruraux. A l’occasion de ces deux journées, qui ont réuni 130 participants, l’enjeu du développement local est revenu régulièrement : comment révéler les atouts et les potentiels du rural ? Comment nouer des coopérations avec les territoires urbains ? Comment s’appuyer sur la révolution numérique pour le développement rural... ?
Il ressort de l’ensemble des témoignages et contributions que chaque territoire rural recèle de potentiels et de ressources, d'acteurs socio-économiques, d'habitants, d'élus… qui ont envie de faire du développement ensemble. Pour Cap Rural (et les participants), il faut alors sortir du "défaitisme rural" et des frontières administratives, passer d’une vision "défensive" de la ruralité à une vision "offensive" et positive, et se lancer dans des projets concrets qui répondent aux besoins locaux. Impliqué depuis son origine dans la professionnalisation des agents de développement rural, Cap Rural a eu l’occasion, au cours de ce séminaire, de rappeler que le développement local ne peut se faire qu’en présence d’une ingénierie de développement efficace, ce qui nécessite des moyens d’accompagnement et de mises en réseaux des acteurs locaux.
Les objectifs de l'association Nouvelles Ruralités
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Avec son ambition de favoriser l’innovation, l’anticipation pour un développement de tous les espaces ruraux, ouverts et non sanctuarisés, avec des populations pouvant y vivre dignement, Cap Rural rejoint les objectifs de l’association Nouvelles Ruralités. Cap Rural porte en effet le projet d’espaces ruraux vivants, aux fonctions diversifiées (productive, résidentielle, touristique et nature), composés par une mixité de populations et de type d’activités, et mettant en œuvre de réelles dynamiques économiques, sociales et environnementales, dans le cadre de relations équitables avec les espaces urbains.
La journée du 29 septembre
A la première table ronde intitulée "Les enjeux de la ruralité", Gérard-François Dumont - géographe, économiste et démographe, professeur à l'Université Paris-Sorbonne - s’est prêté à une analyse critique de la méthodologie actuelle de définition de l’espace rural par l’INSEE. Il a mis en exergue les multiples enjeux liés à cette approche statistique :
- Un enjeu de connaissance avec la nécessité d’une analyse fine des dynamiques à l’œuvre pour élaborer des politiques d’aménagement en phase avec les réalités des territoires
- Un enjeu politique dans la perspective de propositions législatives adaptées à ces réalités
- Un enjeu démocratique en vue de favoriser la participation citoyenne
- Un enjeu de proximité pour appréhender les questions de sécurité
Laurent Rieutord - professeur de géographie humaine au Centre d’Études et de Recherches Appliquées au MAssif Central, à la moyenne montagne et aux espaces fragiles (CERAMAC) - a notamment fait état de tendances récentes observables pour l’espace rural : un regain d’attractivité, un réel dynamisme entrepreneurial, un phénomène de déconcentration des activités vers le périurbain et le rural... Ces tendances induisent un taux de croissance dans ces espaces régulièrement supérieur à celui de l’urbain.
Cette table ronde s’est conclue avec la présentation de l’expérience de la Ferme de Figeac dont l’activité se développe et se diversifie depuis plus de 30 ans grâce à son ancrage territorial et sa dynamique de coopération multi-acteurs. Le credo des initiateurs de cette expérience : le territoire, un allié, un avenir !
Sous le titre "Activités économiques, emploi, entrepreneuriat en zone rurale", la deuxième table ronde était construite autour de deux approches : territoires ruraux et nouvelles compétences des collectivités depuis les lois NOTRe et MAPTAM ; économie de proximité comme nouvelle chance pour le rural. On retient en particulier des contributions que :
- Ces lois récentes ouvrent sur de possibles voire nécessaires échanges, ajustements et accords entre les différents niveaux de collectivités, notamment en matière de développement économique
- Les chefs de file en matière de développement local sont les EPCI qui ont un rôle primordial à jouer en matière d’animation et de mise en réseau / en relation des acteurs de leur territoire
La troisième table ronde abordait la question de la culture comme levier de développement et vecteur de changement de la représentation, avec entre autres la présentation de l’expérience "L’épicerie culturelle ambulante en Rhône-Alpes". Les participants ont ici largement évoqué l’action culturelle comme une opportunité de fabriquer du commun, de (re)mettre en lien et de construire du lien social au sein des villages. Les démarches descendantes ont été critiquées tandis que le droit d'inventer des moyens de soutenir des formes culturelles adaptées à l’espace rural a été mis en avant.
Cette première journée s’est achevée par une lecture spectacle de Jean Bijko - fondateur du TéATR'éPROUVèTe en Bourgogne - "Un temps à deux pattes", histoire comparée de deux ruralités (Morvan et Ukraine).
La journée du 30 septembre
Elle était consacrée à trois tables rondes :
"La révolution numérique : une chance pour nos campagnes", avec :
- Le témoignage de de Sébastien Oziol, de l’agence départementale de développement économique de la Lozère qui œuvre avec sa plateforme Share Lozère à la promotion de son territoire, sa connexion avec l’extérieur, l’interconnaissance des acteurs, la fertilisation croisée et contribue à la création d’entreprises et à l’émergence d’innovations issues de démarches collaboratives ou encore d’intersection entre les différentes filières
- Les apports de Sébastien Côte - organisateur de RURALITIC - qui pointe les enjeux de la médiation numérique et les formidables potentiels de développement endogène offerts par le numérique qui permet notamment de détecter et de valoriser des talents locaux
"Le rapport ville/campagne : interdépendance et fertilisation croisée - l’accueil de populations nouvelles", avec :
- Une contribution de Jean-Yves Pineau du Collectif Ville-Campagne qui voit une urgence à redessiner un projet de société et invite - entre autres - à rendre les frontières entre le rural et l’urbain poreuses et à développer des écosystèmes territoriaux ouverts et reliés car les "clés d’un territoire sont dans les autres territoires"
- Lee témoignage de Jean-François Boat - élu à l’agriculture urbaine de la ville d’Albi - qui élabore et met en œuvre un projet "Vers une autosuffisance alimentaire dans un rayon de 60 kilomètres à l’échéance 2020"
"Démocratie représentative/démocratie participative", avec les témoignages de Fernand Karagiannis, adjoint à l’économie de la ville de Saillans (26), qui a exposé les modalités de la gouvernance collégiale et participative de la nouvelle équipe municipale, et d’Isabelle Garderes, directrice de la SCIC Combrailles Durables, une coopérative citoyenne et solidaire de production d'énergie renouvelable qui, à ce jour, a installé plus de 2200 m2 de panneaux photovoltaïques et réunit plus de 270 coopérateurs.
Mots-clés: culture, coopération, accompagnement, numérique, associations, Etat, ingénierie