Pour comprendre la formule, il faut lire le texte d'Eric Charmes publié le 24 octobre 2017 dans La Vie des idées. Pour le chercheur en sciences sociales appliquées aux questions urbaines et à l'urbanisme, et à contrecourant du discours/diagnostic qui oppose la richesse des villes à la pauvreté des campagnes, "les territoires en crise sont (...) avant tout des cœurs de ville, des territoires très urbains" ; en profitent alors "des campagnes périurbaines qui prennent le pouvoir".
En 2005, l'association Afip Bourgogne Franche-Comté entraînait la communauté d'agglomération du Grand Besançon, la Chambre d'agriculture du Doubs et un CFPPA dans un projet européen : Solidarités agricole et urbaine pour des gains économiques, environnementaux et en termes d'emploi. Celui-ci visait à diversifier et adapter les activités agricoles en contexte périurbain, relier la demande locale et l'offre de produits agricoles, développer la formation, l'insertion et l'emploi dans les activités agricoles et rapprocher les différents acteurs de l'urbain, du périurbain et de l'agriculture. Un dossier de Transrural Initiatives revient sur cette expérience, décrypte les conséquences de cette dynamique (notamment la création d'un Espace-Test-Agricole) et saisit l'occasion pour questionner la place et le rôle de l'agriculture dans les territoires urbanisés.
"Ils ont longtemps été décriés (pour leur dépendance à la voiture, leur propension à surconsommer du foncier…). Paradoxalement, ils n'ont encore été l'objet d'aucune politique publique nationale spécifique. Du côté des professionnels, peu d'architectes, urbanistes ou de paysagistes s'y sont intéressés et investis. Y habitent pourtant une fraction non négligeable de la population française (plus de 40%). « Ils », ce sont les espaces périurbains et ce qu'il est convenu d'appeler les « campagnes urbaines ». Les reproches qui leur sont adressés ne sont pas infondés, mais ne sauraient faire oublier cette autre réalité : ces mêmes espaces recèlent un potentiel insoupçonné (du moins pour ceux qui ne les fréquentent guère), en termes de développement économique, mais aussi de cadre de vie. Outre l'actualité relative à la « France des ronds-points » et à la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19, l'objectif ZAN (Zéro Artificialisation Nette) fixé par les pouvoirs publics, amène à les considérer avec plus d'attention. Et s'ils étaient non pas le problème, mais un début de réponse à bien des problèmes ?" Le programme Campagnes urbaines du PUCA s'enrichit d'une nouvelle publication et de six podcasts sur la vie dans les lotissements.
"Avec la crise sociale et démocratique que connaît la France, il est devenu courant d'opposer les grands centres urbains et une supposée « France périphérique ». Mais plutôt que de construire de telles oppositions, propose la géographe Cynthia Ghorra-Gobin, il est sans doute temps d'articuler d'un point de vue théorique et pratique la « métropolisation des emplois » et la « périurbanisation de l'habitat », dans le but de réduire les coûts directs et indirects supportés par les ménages modestes". Dans un court article, l'universitaire explore la thématique de l'articulation entre la métropole et sa périphérie à partir d'une analyse comparée entre deux métropoles (Lyon et Minneapolis Saint Paul aux États-Unis). "Il sera question de la reconnaissance de la dimension historique du territoire, de l'impératif d'imaginer une évolution de la morphologie spatiale du périurbain et de la prise de conscience du pouvoir politique de la métropole face aux autres instances décisionnelles." Et la géographe de plaider pour envisager une relation de complémentarité entre la ville-centre, la métropole et les territoires adjacents.
Le plan urbanisme construction architecture (PUCA) menait en 2019-2020 un cycle de cinq conférences en France pour croiser les regards afin "d'esquisser des propositions d'actions concernant le devenir des campagnes urbaines notamment en termes d'occupation et de recyclage des sols, de production agricole, de politiques d'aménagement, de modèles de transition et de coopérations interterritoriales." Les vidéos sont à présent en ligne.
C’est ce qu’a annoncé la ministre du Logement, de l’Égalité des territoires et de la Ruralité le 12 novembre 2015, à l’occasion de la rencontre-débat "Vivre et habiter le périurbain, aujourd’hui et demain" organisée par le ministère avec l’appui du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET). Après les banlieues, avec le NPNRU, le monde rural avec le comité interministériel à la ruralité, c’est au tour du périurbain d’être mis sur le devant de la scène, celui-ci pouvant d’ailleurs recouper les deux premières thématiques. Parmi la série de mesures annoncées : la création d’un "lab du périurbain", plateforme pour recenser, valoriser et diffuser les projets innovants et initiatives remarquables dans ces territoires ; l’organisation d’ateliers territoriaux de l’ingénierie périurbaine dès 2016 afin de faire émerger des projets en mutualisant les initiatives et les savoir-faire des différents acteurs ; l’élaboration de conventions cadres sur le développement et l’innovation avec les principaux acteurs territoriaux ; le lancement d’une mission sur la revitalisation des petits commerces en centres-villes et en centres-bourgs. A noter : si vous souhaitez contribuer aux travaux d’exploration et de réflexion sur les territoires périurbains et leurs habitants que conduisent le ministère et le CGET, un formulaire est en ligne !
Le 7 décembre 2021, au lycée agricole Louis Pasteur de Marmilhat (63), Cap Rural organisait une journée d'échanges pour montrer comment le monde agricole et les acteurs des territoires périurbains travaillent ensemble pour développer une activité agricole de proximité et l'intérêt d'une telle collaboration.
Dans son édition de décembre 2021, la revue du Réseau Rural Français consacrait son dossier à l' "Exode urbain : quelles réalités ?". Associé au Plan urbanisme construction architecture (PUCA), il annonçait une étude nationale sur l'impact de la pandémie de Covid-19 sur les mobilités résidentielles, rendue publique le 17 février 2022 sous le titre "Exode urbain ? Petits flux, grands effets. Les mobilités résidentielles à l'ère (post-)COVID". Résumé par Localtis : "Loin d'être massif, l'exode correspond davantage à de petits flux - qui ont toutefois un impact en termes de dynamique territoriale - et ne concerne pas toutes les catégories de villes. L'étude signale en revanche l'émergence d'un nouveau modèle d'investissement immobilier dans les territoires ruraux." On pourra lire encore le point de vue de l'universitaire Pierre Cornu, membre du Laboratoire d'études rurales (Lyon 2), sur la notion d'exode vue dans une perspective historique.
UN mythe et DES réalités. C'est la réponse de l'étude "Exode urbain : impacts de la pandémie de COVID-19 sur les mobilités résidentielles", lancée en 2021 et commandée par le Réseau rural français avec le soutien du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) et de l'Europe (FEADER). "Les résultats invitent à fortement nuancer l'idée d'un exode urbain, qui bouleverserait les structures territoriales françaises. Dans les faits, la géographie des projections et des déménagements des Français dans le « monde d'après » ressemble finalement très fortement à celle du « monde d'avant », c'est-à-dire principalement structurée autour des pôles urbains, qui concentrent emplois, services, structures éducatives, ainsi qu'une grande partie de la population française". Plusieurs documents ont été produits - qui apportent de la nuance -, dont une application permettant de visualiser les déménagements réalisés en France métropolitaine entre 2017 et 2022, à plusieurs échelles. A lire également, les résultats d'une recherche du Forum Vies Mobiles sur l'influence du télétravail dans les projets de déménagements des Franciliens.
Plusieurs travaux d'Éric Chauvier concernent des objets urbains (le périurbain, des équipements, les grandes agglomérations...). Interrogé dans la revue Tous urbains sur sa nouvelle publication, La Petite Ville, où l'anthropologue s'intéresse à "un pôle urbain secondaire", l'auteur livre une analyse sur la "manière de gérer, de manager les territoires, comme on le fait dans les entreprises". Il décrit encore "l’effacement de l’urbanité qui se produit dans les petites villes ainsi que le lien avec une certaine forme de frustration, qui creuse le lit des controverses entre métropoles et territoire périphérique". Dans "un contexte de perte de savoir-faire", il regrette que "la valorisation du patrimoine, urbain, naturel ou agricole ne figure pas (...) dans les priorités". Mêlant recherche et intimité, les propos dressent des constats mais également des pistes d'action.
Insee Analyses Rhône-Alpes est une publication régulière en ligne proposant des diagnostics et éclairages sur les enjeux de la région et de ses territoires. Plusieurs analyses publiées au premier semestre 2015 portent sur des territoires spécifiques : Faucigny : un territoire relativement jeune où industrie et tourisme soutiennent toujours l'emploi ; L'Ouest Lyonnais : une périurbanisation douce ; Avenir Dombes Saône : un territoire à préserver aux portes de Lyon ; L'Avant-pays savoyard-Chartreuse : préserver les équilibres face à une forte attractivité ; Isère, Porte des Alpes : pôle économique en soi et territoire sous l'influence de Lyon.
"Dans un contexte de crise économique, de catastrophe climatique, de luttes altermondialistes et démocratiques, la première décennie du XXIe siècle a été le théâtre de contestations sociales marquées par un ancrage spatial des revendications et des conflits. Printemps arabes, Gilets jaunes, Blacks Lives Matter, #MeToo, marches pour le climat… Les mobilisations et les mouvements sociaux visant à la défense de causes spécifiques s'enchaînent, et la colère semble un puissant dénominateur commun de ces manifestations disparates." La revue Géographie et cultures a cherché à "questionner les traductions spatiales des colères, à différentes échelles", en se penchant essentiellement sur le mouvement des Gilets jaunes. Tous les articles sont accessibles en ligne.
La consommation des espaces agricoles par l’urbanisation est l’un des enjeux qui ont conduit l’État à instaurer une politique d’aménagement territorial durable depuis les années 2000. Cette politique remanie le cadre législatif qui préside à la gestion du bâti agricole, révisant notamment le droit pour les agriculteurs de construire leurs logements en zone agricole. Alors que les priorités nationales visent la protection des espaces agricoles, leur mise en œuvre par les collectivités, dans le cadre de la gouvernance territoriale, engendre des interprétations variées de la loi et intègre de nouveaux enjeux. Les politiques locales donnent le jour à des formes diverses et innovantes de gestion du bâti agricole, telles les "hameaux agricoles" développés dans l’Hérault. La mise en œuvre des principes d’aménagement durable soulève ainsi des problématiques inédites de gestion spatiale et sociale du bâti agricole. A lire sur cette question, une analyse du Centre d'études et de prospective du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
L'agriculture de proximité, entendue "comme l'ensemble des formes agricoles porteuses de liens fonctionnels et positifs avec la ville", a été l'objet d'un travail mené en 2019 par la Safer de l'Île-de-France et l'Association Française d'Agriculture Urbaine Professionnelle. "Ces formes agricoles [présentes dans l'urbain, le périurbain et le rural] sont attendues pour recréer du lien entre mondes agricole et urbain, répondre à des enjeux d'alimentation locale, être créatrices de liens sociaux, donner une seconde vie à des espaces délaissés…" Identifiant des leviers et freins au développement d'installations agricoles de proximité, ainsi que des besoins d'accompagnement, un guide a été réalisé à destination "des collectivités ou acteurs de l'aménagement urbain ayant la volonté de contribuer à l'installation de nouveaux projets agricoles sur leur territoire."
Cette étude porte sur le "processus de départ de citadins vers des communes rurales, en général à proximité (périurbanisation) mais souvent en discontinuité (rurbanisation) des zones urbaines".
Quasi au même moment, l'INSEE publiait un nouveau zonage de la France en "aires d'attraction des villes", selon lequel "93% la population vit dans l'une des 699 aires d'attraction des villes", puis le Comité interministériel aux ruralités dévoilait un nouveau "zonage rural" faisant bondir la part de la population rurale à 35% de la population totale. Alors, Martin Vanier, dans un article intitulé "Deux cartes pour regarder le pays au fond des yeux", s'interroge : "Tous urbains versus tous ruraux : laquelle de ces deux images est la bonne ? Les deux à la fois, mais alors qu'est-ce qui doit nous gouverner, et dans quel cadre admis par tous ?" Le Professeur d'aménagement et urbanisme invite à "revisiter les catégories, plutôt que de bricoler les pourcentages" et alerte sur la "démagogie territoriale" car "ce qui se passe aux États-Unis [l'article a été écrit début décembre 2020] devrait conduire à ouvrir grand les yeux sur le sens de ce retour de ruralité dans la France contemporaine. Un pays qui ne construit plus l'accord pour dire ce qu'il habite et comment il l'habite est politiquement en grand danger."
C'est le projet "Nouvelles Richesses" de Frédéric Bonnet, Grand Prix d'urbanisme 2014 et auteur du rapport "Aménager les territoires ruraux et périurbains" remis cet hiver au gouvernement, qui a remporté le concours pour représenter le projet français retenu pour l'édition 2016 de la Biennale de Venise. "Toutes ces dernières années, quand on parlait d'architecture, il n'était question que des grands projets phares des grandes métropoles : Grande Bibliothèque, Grand Louvre, Grand stade... J'ai voulu cette fois que l'on parle du reste, a déclaré l'architecte, de ces petites opérations bien faites susceptibles de changer la vie, partout, dans les bourgs, les villages, les banlieues et tout ce péri-urbain délaissé." La scénographie du projet "Nouvelles Richesses" sera fondée autour d'expériences réelles de territoires confrontés à l'architecture "ordinaire", au travers de 22 opérations photographiées.