Inégalité des territoires versus égalité des individus

Dans deux entretiens publiés par La Croix en mars 2015 et La Gazette en juin de la même année, l’économiste Laurent Davezies analyse le creusement des inégalités entre les territoires, à l’œuvre en France depuis trente ans : le système productif a radicalement changé (et sa géographie aussi), se tournant vers une économie de la matière grise et se rétractant autour des métropoles. Si des mécanismes de redistribution ont permis de rééquilibrer les revenus entre les territoires, la crise de la dette (2011) a mis fin à l’augmentation des dépenses publiques et a accéléré la concentration territoriale de la production, détruisant les emplois dans les secteurs les plus vulnérables de l’industrie. De grandes métropoles (comme Lyon) ont su tirer leur épingle du jeu, mais les territoires qui étaient les plus dépendants des revenus non marchands sont de plus en plus vulnérables. Aujourd'hui, il y a les métropoles qui sont des territoires de dynamisme économique même si elles concentrent aussi le gros de la pauvreté, les territoires qui décrochent parce qu’ils cumulent recul de l’appareil productif, faible qualité résidentielle et baisse des dépenses publiques et, entre les deux, de larges parties du territoire qui bénéficient encore d’une économie résidentielle forte et survivront grâce au tourisme et aux retraités. "Les élus ont tendance à considérer qu’il faut à tout prix essayer de retenir les jeunes en développant localement l’emploi, les formations ou le logement. Voilà trente ans qu’on fait ça et ça ne marche pas ! (...) Il faut reculer la ligne de front. Mettre le paquet sur les zones d’accueil les plus proches qui s’en sortent le moins mal. Et pour cela, il faut libérer la mobilité, subventionner massivement les déménagements, revoir les politiques de logement et les droits de mutation qui sont un frein à la vente quand on est propriétaire."

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